Une barrière est dressée par le foot-pognon contre le sport populaire. Et il va y avoir deux côtés de la barrière : D’un côté, l’argent. De l’autre le peuple relégué. Pour moi, élu communiste et Front de Gauche de Saint-Denis, « ville des rois morts et du peuple vivant » disait le poète, le bon côté de la barrière est celui des relégués.
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Hier soir en tout début de séance du conseil municipal, il y avait un débat relatif à l'Euro 2016, à l'occasion d'un projet de "convention type de mécénat". Vous trouverez ci-dessous l'intégralité de mon intervention :
« Comme l’ont été en 1998 la Coupe du Monde de football et en 2003 les Championnats du Monde d’athlétisme, l’Euro 2016 aurait dû être une grande fête populaire pour les dionysiens et les dionysiennes. La ville et nos concitoyens s’y sont préparés. Dans les écoles, dans les centres de loisirs, dans les rues, dans les fêtes de quartiers, un peu partout les initiatives, grandes ou petites, se sont multipliées pour mettre la ville aux couleurs de l’Euro.
Téléchargez l'intervention intégrale en PDF.
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Mais c’était sans compter sans le gouvernement qui a fait voter par sa majorité au Parlement (Avec les deux députés PS de notre ville, Bruno Le Roux et Mathieu Hanotin), une loi de finance qui prive notre ville d’une recette de 8 millions d’Euros en faisant cadeau de la taxe sur les spectacles à ces « grands nécessiteux » de l’UEFA.
C’était sans compter aussi sans le foot-pognon, qui impose ses règles à notre gouvernement et à notre territoire.
C’était sans compter sur la privatisation scandaleuse de larges espaces publics autour du Stade-de-France au profit d’intérêts privés.
C’était sans compter sur des pouvoirs publics qui perdent toute dignité en justifiant cette privatisation du bien public par des motifs sécuritaires. Alors que la finale PSG-Marseille du week-end dernier a fait la démonstration qu’ils ont en fait créé une véritable « passoire sécuritaire ». Et que nous savons tous que les terroristes qui se sont fait exploser en novembre l’ont fait du côté de la barrière où l’État et l’UEFA relèguent nos concitoyens. Et qu’il n’est pas besoin d’être sorti de la promotion Voltaire de l’ENA pour comprendre que si d’autres terroristes avaient pour projet de se faire exploser dans le secteur, ils le feraient 50 mètres plus loin ou à la sortie des RER !
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Cette captation par le foot-pognon, avec la complicité des pouvoirs publics, pourrait bien nous gâcher la belle fête que nous attendions.
Dans ce contexte, la délibération qui nous est proposée me paraît déplacée.
Je ne crois pas —toujours dans le contexte qui est celui que je viens de décrire— qu’il soit opportun, au travers d’une convention de mécénat, d’apporter notre pierre à un peu plus de captation de cet événement par des intérêts privés.
Car c’est bien de cela dont il s’agit.
Il faut pour s’en convaincre lire les contreparties qui seront accordées aux mécènes, dans le document annexé à la délibération :
- Une « déduction de 60% du don sur le résultat net imposable de l’entreprise », au moment même où la majorité municipale (à mon exception près) a voté une augmentation des impôts de nos concitoyens.
- Des invitations offertes par la ville sur des « places de catégorie 1 et 2 », « pour les 7 matchs se déroulant au Stade-de-France ».
- L’accès à des cocktails dînatoires d’avant match ou d’après match, dans le Musée d’Art et d’Histoire de la ville privatisé pour ces occasions.
- L’ « accès à l’espace VIP de la Ville de Paris » ; avec « un cocktail dînatoire avec retransmission de matchs sur écran géant ».
Ce qui aurait peut-être été acceptable dans un autre contexte ne l’est plus, à partir du moment où le foot-pognon et un État complice ont dressé un mur de relégation autour du cœur de l’événement.
Même menacé par le loup, le renard ne renoncera pas à plumer la volaille !
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Récemment le maire a fait une conférence de presse avec un petit aréopage de commerçants et patrons du cru pour dénoncer la barrière. C’est bien. Mais c’est insuffisant. Car si nous en restons-là, au travers de cette conférence de presse on nous invite à nous mobiliser pour des patrons locaux mécontents de s’être fait flouer par plus gros patrons qu’eux.
J’avoue que ça me laisse assez froid.
L’argument de l’emploi local est juste. Même si finalement nous ne savons pas vraiment si dans le Stade et les activités connexes il n’y a pas non plus des dionysiens et dionysiennes employés.
Mais je crois que pour les patrons locaux, c’est surtout un « argument de vente ». Il est en effet bien moins « sexy » de se plaindre qu’on est empêché de s’enrichir un peu par d’autres plus puissants qui vont s’enrichir beaucoup. Même menacé par le loup, le renard ne renoncera pas à plumer la volaille !
On ne peut comprendre autrement l’absence à cette conférence de presse ou dans les jours suivants de toute initiative avec des salariés, leurs représentants et leurs organisations représentatives.
Mes cher-e-s collègues, lors de cet Euro 2016, à notre corps défendant une barrière est dressée par le foot-pognon contre le sport populaire. Et il va y avoir deux côtés de la barrière : D’un côté, l’argent. De l’autre le peuple relégué.
Pour moi, élu communiste et Front de Gauche de Saint-Denis, « ville des rois morts et du peuple vivant » disait le poète, le bon côté de la barrière est celui des relégués.
Toutes et tous ici, nous avons marqué notre mécontentement, il me semble. Mais il faut des actes !
Je crois que nous devons à nos concitoyens, d’être exemplaires, d’agir et d’assumer nos responsabilités ainsi que notre fonction représentative :
- En nous engageant à ce qu’aucun élu de notre ville n’aille aux matchs de l’Euro au Stade-de-France ; ceci pour porter de façon visible le mécontentement de notre ville par une politique de la « chaise vide ».
- Par voie de conséquence en nous engageant à donner nos places (pour celles et ceux qui en ont), à nos concitoyens qui n’ont jamais été au Stade-de-France. Car ce Stade est l’un des cœurs battants de notre territoire, et permettre malgré les obstacles à plus d’habitants de le vivre est aussi une manière de lutter contre sa captation par des intérêts privés.
- Enfin, ce soir, en refusant la convention de mécénat. Contre laquelle je vais donc voter. »