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Hier soir le conseil municipal a adopté un vœu soutenant les salariés de SFR en lutte contre les suppressions d'emploi décidés par leur employeur, et demandant des comptes à ce dernier.
L'ampleur du projet de suppressions d'emploi décidé par SFR interroge notre modèle de développement économique et urbain.
Je vous propose ci-dessous mon intervention au conseil. Vous trouverez également la reproduction du vœu que nous avons adopté et le message que nous ont adressé les salariés de SFR.
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« D’abord je voudrais remercier les salariés en lutte de SFR d’être parmi nous et de venir nous apporter leur témoignage. Je vais évidemment voter le vœu proposé par mon groupe, Front de Gauche, et porté par la majorité municipale. Je me réjouis que l’opposition municipale d’ailleurs le fasse aussi et qu’on arrive à une unanimité.
J’aurai néanmoins quelques remarques.
Car en effet je ne suis pas totalement certain que nous prenions encore toute la mesure de ce qui se passe et de ce que signifient ces suppressions de postes.
C'est une excellente chose que dans le vœu nous demandions à SFR, dès lors qu'ils persisteraient à supprimer des postes, de chiffrer précisément combien dans notre ville. Mais je regrette la timidité à avancer un chiffre.
Le 7 septembre je me suis de mon côté risqué à un chiffrage. C’est assez simple : rapporté au site de notre ville, qui accueille, selon les sources 7500 emplois ou 8500, un tiers des emplois que SFR annonce vouloir supprimer cela représente au bas mot 2500 emplois. Auxquels il faut ajouter les emplois de sous-traitance et les emplois induits. Par emplois induits j'entends par exemple les commerces locaux qui se sont installés aux abords de SFR, ou ceux à qui la conciergerie de SFR fait appel.
Par ailleurs, on se souvient que le 14 avril dernier, la revue « Challenges » annonçait que le patron d’Altice, Patrick Drahi, veut carrément quitter le site de Saint-Denis.
Il faut donc bien prendre la mesure du choc.
L’hémorragie d’emplois autant que les projets du patron d’Altice rappellent les traumatismes qu’a subit notre ville pendant la casse industrielle des entreprises de la Plaine. Et qu’il a fallu plusieurs décennies pour se relever.
Cette situation interroge directement notre modèle de développement économique et urbain. Nous ne pouvons pas faire l'économie de le revisiter.
Notre municipalité et les précédentes ont surmonté le traumatisme de la désindustrialisation en portant, avec les villes d'Aubervilliers et de Saint-Ouen, un projet urbain qui visait à valoriser la situation géographique de la Plaine-Saint-Denis et les espaces en friche "libérés" par la casse industrielle. Et des dizaines de milliers d’emplois sont revenus. Conjointement, le logement s'est développé ainsi que les commerces.
Mais le cas SFR montre que ce modèle est fragile !
Car ces grands entreprises sont venues à par opportunité financière et à grands renforts de « cadeaux territoriaux ». Il a toujours fallu en faire plus : pour la sécurité, en acceptant les transports privés sur nos routes, en parlant d'eux (forcément en bien, évidemment !) en permanence sur les supports de communication de la Communauté d’Agglomération.
Et à ce que nos collectivités ont mis sur la table pour les faire venir, sont venus se greffer des cadeaux de l'État, comme le Crédit d’impôt pour la compétitivité et les exonérations en tous genres…
En contrepartie de quoi, de la part de ces grandes entreprises il y a eu des promesses non tenues, comme le maintien de l'emploi, l'achat local et la défense des intérêts de nos territoires.
Elles font aussi fi de leurs engagements à embaucher localement, à soutenir les projets voir même à aider nos étudiants, malgré les outils et sollicitations mis en œuvre par Plaine Commune, comme la Charte « entreprises-territoire », les programmes d'insertions, etc.
Et si demain, un territoire voisin propose mieux, elles s'en iront. C’est ce que montre le cas SFR. Car ces grandes entreprises n'ont que très peu d'attaches sur le territoire.
Ce qui se passe à SFR nous pose un premier défi : celui de notre dépendance à des entreprises de grande taille dont l'arrivée comme le départ bouleversent à chaque fois notre territoire et toute notre ville.
Dans des secteurs économiques en rapides, perpétuels et profondes mutations —le plus souvent plus pour des raisons capitalistiques plus qu'industrielles—, le cas de SFR montre que ces aléas sont violent et capables de bouleverser notre territoire et notre ville, jusqu’à les déstabiliser.
S’il y a et s'il faut des grandes entreprises sur notre territoire, une mesure d'impact et une réflexion globale sur le pendant et surtout sur l'après doivent être mise en œuvre d’urgence.
C'était d'ailleurs un engagement de notre campagne électorale de 2014 (document « Ensemble nous sommes Saint-Denis » ; page 14) : « créer l'observatoire du développement économique de Plaine Commune et organiser une Conférence annuelle et du développement local ». Nous n’avons que trop tardé à mettre cet engagement en œuvre.
Alors oui, faut demander à l’État, comme nous le faisons dans ce vœu, qu’il mette en place « un observatoire départemental sur les conditions d’utilisation du CICE ». Mais il ne dépend que de nous et pas de l’État de mettre rapidement en place notre « observatoire du développement économique » !
Le second défi posé à notre territoire par le cas SFR est celui de la diversité du tissu économique local.
La réalité est que les embauches, les stages et l'ancrage territorial est surtout assuré et garanti par les TPE et PME. Pour elles, nous n'avons pas toujours les yeux aussi doux que nous les avons eus pour les grandes entreprises que nous avons voulu faire venir !
Bien que beaucoup d'efforts sont réalisés pour l'accompagnement à la création de ces TPE et PME, peu de choses sont faites en réalité pour les garder sur le territoire. Pour elles, il y a peu de réserves foncières, pas ou peu de politique d'achat local, pas d’aides fiscales, sociales ou aides diverses.
Et nous faisons si peu ou si lentement pour accompagner ce que pourtant toutes les analyses sur le sujet indiquent comme étant une dimension essentielle de l'avenir des entreprises (que ça nous plaise ou non) : l'entreprenariat personnel.
Oui, il faut dénoncer comme nous le faisons ce soir, les abus des grosses entreprises ; les mettre devant leurs contradictions et manifester nos désaccords publiquement.
Mais il faut aussi mettre en place une politique de développement économique liée à l'intérêt du territoire, en lien avec les universités, en lien avec notre population, en soutenant leur incubation (par exemple en soutenant et développant les « tiers lieux » comme les pépinières, les espaces de CoWorking, les couveuses, etc.), leur implantation (avec des réserves foncières), leur financement (par le biais des réseaux à développer), leur formation et leur accompagnement du projet à la croissance…
Bref, il faut plus et mieux accompagner les initiatives privées ; lier l'emploi, la formation et l'insertion au développement économique, décloisonner les services pour faire en sorte que cela soit l'affaire de tous. Probablement en redonnant une dimension municipale à cette compétence déléguée à Plaine Commune.
Ceci pour recréer un vrai tissu économique local durable, dont la solidité sera nourrie par son ancrage dans le territoire et le maillage d'entreprises de toutes tailles. Et faire de notre territoire, un lieu de vie en cohérence avec ses envies et ses besoins.
C'est cela que nous disent les suppressions d'emplois de SFR.
Enfin pour conclure, je formule deux propositions :
• Je l’ai déjà dit dans un précédent conseil : « trop de vœux, tue le vœu ». On ne compte plus les vœux que nous avons votés ici et qui sont ensuite restés lettre morte. Alors à la formule précédente, je voudrais ajouter celle-ci : le vœu ne s’use que si l’on ne s’en sert pas.
Je vous propose donc que ce vœu une fois adopté, nous prenions la décision ce soir d’aller tous ensemble le distribuer (sous une forme remise en page) avec le maire un midi, et la majorité municipale et l’ensemble du conseil municipal si l’ensemble du conseil municipal le vote ; la semaine prochaine aux salariés du site SFR de la Plaine.
• Je vous propose aussi que nous prenions la décision ce soir de mettre d’urgence en œuvre notre engagement de campagne de « créer l'observatoire du développement économique de Plaine Commune et organiser une Conférence annuelle et du développement local ».
Que cela se traduise par une information ou un rapport au prochain conseil municipal. Qui prévoirait en particulier l’organisation d’ici la fin de l’année cette Conférence.
Et en préfiguration de cet observatoire, je vous propose que le maire de notre ville demande directement à la Banque de France (comme il l’avait fait il y a quelques années concernant le surendettement) qu’elle nous fournisse les informations (Elle en dispose !), sur les dépôts, les crédits aux particuliers et les crédits aux entreprises ; banque par banque et quartier par quartier. Ceci afin de s’assurer que va l’agent local va bien aux activités et à l’économie locale. »
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2500 emplois supprimés à Saint-Denis ? - Philippe Caro
Les conséquences directes pour notre ville de la décision des actionnaires et dirigeants d'Altice et SFR sont encore trop sous-estimées. (.../...) Je souhaite que lors du prochain conseil municipal
http://philippecaro.over-blog.com/2016/09/2500-emplois-supprimes-a-saint-denis.html